Le dialogue social chahuté par la crise

La représentativité des syndicats est mise en doute, alors que les acteurs du dialogue social sont unanimes à souligner l’intérêt des négociations avec les partenaires sociaux. Au cours de la conférence consacrée au dialogue social, trois acteurs de terrains ont leur livré leurs réflexions sur la représentativité des syndicats.

Le dialogue social, «cette partie de billard entre acteurs, tout le monde est pour mais au final c'est quoi ?», s'interroge Raymond Soubie. Pour cet ancien conseiller social auprès du Président Nicolas Sarkozy, «les acteurs sociaux n'ont pas vocation à parler de tous les sujets. Dans le dialogue social, il y a ce qu'on peut faire et ce que l'on ne peut pas faire. Les problèmes à régler sont très difficiles. On parle d'endettement, de la compétitivité française, de la gouvernance de la zone euro.» Mais ne parlez surtout pas de « consensus » à Benoît Roger-Vasselin, président de la Commission des relations du travail du Medef. Le mot d'ordre, à ses yeux, c'est le « compromis ». « Il faut que chacun fasse des efforts pour parvenir à un accord, à la définition de la norme sociale ».

Débat sur la méthode

L'urgence aujourd'hui est de composer avec le déclin de la représentativité des organisations sociales. « Sous le gouvernement Barre, les syndicats représentaient 25% des salariés, aujourd'hui, ce chiffre est tombé à 8% », insiste Raymond Soubie. Laurent Berger, secrétaire national de la CFDT, ne nie pas les faits : « Oui, nous vivons une faiblesse des syndicats et des corps intermédiaires démocratiques en France ». Mais il s’indigne de la légèreté avec laquelle les syndicats sont considérés : « Pour le plan de rigueur, nous avons été prévenus cinq minutes avant l’intervention du Premier ministre », situation qui d’après lui, aurait été impossible en Allemagne.
Si la nécessité du dialogue social n'est pas contestée, se pose néanmoins la question de la composition des forces vives des syndicats. « L'image du syndiqué est celle d'un homme plutôt âgé, qui travaille dans la fonction publique. Très rarement, ce sont des précaires, alors que ces personnes sont sur le marché du travail. »
Autre questionnement, celui des moyens dont disposent les syndicats. « Le mode de financement est trop peu assis sur les cotisations », estime Bruno Decreuse. D’après lui, 70 % du financement des syndicats ne viendrait pas des cotisations des adhérents. Raymond Soubie estime, quant à lui, que, « considérant la mise à disposition, non connue, d’agents publics, les syndicats disposent de moyens considérables. Ce n’est pas anormal, mais ce qui l’est, c’est le manque de transparence dans l'utilisation de ces moyens».

Le risque de la défiance

Ce à quoi Laurent Berger rétorque : "Nous ne voulons pas jouer ce jeu à la con, qui consisterait à alimenter la défiance auprès des acteurs qui ont une place dans la sociétés. Nous sommes 750 000 à la CFDT. Sur le mode de financement, la transparence existe. Nous avons certifié nos comptes bien avant tout le monde et ils sont composés à 65% des cotisations des adhérents." Les conférenciers admettent que la loi Larcher de 2008 sur la représentativité des syndicats a amélioré le dialogue social. '' « La question, maintenant, c'est comment peut on faire plus fort que la loi de 2008. Je suis certain que c'est possible, mais je ne sais pas comment », s’interroge Bruno Decreuse.
Alors, quelles sont les règles du dialogue social ? « La loyauté des acteurs » sinon rien, pour le syndicaliste Laurent Berger. Jacques Barthélémy, avocat conseil en droit social préconise «  une sanction en cas de non-respect des règles, la nullité par exemple ». De son côté, Raymond Soubie lance : « Le dialogue social est un bébé qui ne demande qu’à grandir, mais il ne faut pas qu’il grandisse trop ». Dialoguer mieux, oui, mais pas trop...

Photo : © Adam Radosavljevic - Fotolia.com

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