Le bonheur n’est pas (que) dans le PIB

Quantifier le bien-être d’une population ne se résume plus à la simple mesure de sa richesse. C’est le constat dressé par la table ronde sur le bonheur. La référence : le rapport remis par Joseph Stiglitz à Nicolas Sarkozy en 2009 soulignant que le PIB n’est pas le seul moyen d’évaluer le progrès social. Cependant, l’usage de critères alternatifs pour analyser le bonheur d’un pays n’en est qu’à ses débuts.

« Mesurer le bonheur de façon purement objective est impossible », admet Stefan Lollivier, directeur des statistiques démographiques et sociales à l’INSEE. « C’est plutôt une qualité de vie qu’on essaye d’évaluer », reprend Martine Durand, chef statisticienne à l’OCDE. Et pour ce faire, le PIB n’est plus le seul indicateur pertinent et il s’avère même insuffisant.

Alors quels critères faut-il utiliser pour mesurer le bien-être ? « Une multitude », assure Martine Durand, en présentant une étude menée en près de dix ans par l’OCDE. 22 indicateurs principaux, 35 secondaires, le tout réparti en deux grandes catégories : les critères matériels (salaires, logements…) et ceux relevant de la qualité de la vie (pollution, santé, éducation…)

Demander aux gens ce qui les rend heureux

Mais pas question de lancer une étude démographique de grande ampleur pour l’OCDE. L’organisation européenne s’est simplement procuré des documents officiels. Tout en y intégrant des données subjectives récoltées par des instituts de sondage nationaux. « En d’autres termes, l’idée est d’aller voir les gens pour leur demander ce qui pouvait les rendre heureux. Cela se fait de plus en plus dans les instituts de sondage », explique Martine Durand.

Difficile toutefois de dégager un indicateur synthétique susceptible de décrire le bonheur d’un pays. « A des fins de communication, ce serait sans doute plus pratique. Mais il est très difficile de savoir quelle importance donner à chaque critère pour dégager un indicateur global », reconnaît François Lollivier. Une hiérarchie des indicateurs qui peut varier d’un pays à un autre, voire d’une couche sociale à une autre.

Aux politiques de s'en emparer

« Il faut reconnaître le rôle joué par la culture dans le bonheur », souligne Claudia Senik, professeur de sciences économiques à la Sorbonne. Et la France dans tout ça ? « Vivre en France réduit de 20% la possibilité de se déclarer heureux. Mais il nous faut plus d’études, spécialement pour la comparaison internationale. »

« Attention, ce genre d’étude est valable pour les pays développés. Dans les pays pauvres, les préoccupations ne sont pas comparables », prévient François Bourguignon, directeur de l’Ecole d’économie de Paris. « La pauvreté est multidimensionnelle. Cela ne simplifie vraiment pas la tâche des statisticiens.»

A défaut de permettre une comparaison internationale complète, cette étude du bonheur pourrait tout de même devenir un instrument en vue de détecter des vulnérabilités au sein de sa propre population. « Ces indicateurs permettent de repérer les populations qui n’ont pas accès aux conditions du bien-être », estime Stefan Lollivier, de l’INSEE. Pour Martine Durand, ces études plus précises ne demandent désormais qu’à convaincre les décideurs. « Collecter des chiffres, c’est bien. Mais maintenant, il faut que les politiques s’en emparent. » En 2009, Nicolas Sarkozy a, en tout cas, fait un premier pas avec le rapport Stiglitz-Sen-Fitoussi sur la mesure des performances économiques et du progrès social.

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