Le fédéralisme fiscal, avenir de l'Europe

A l'heure où la Grèce négocie un plan de sauvetage et que l'économie italienne est surveillée de près, la monnaie unique et l'économie de la zone euro paraissent plus que jamais menacées. Une Europe fédérale au niveau fiscal et des Etats solidaires face à leurs dettes : voilà le scénario défendu par les intervenants de la table ronde consacrée à l'avenir de la zone euro.

" L'euro est une monnaie sûre. L'avenir de la zone dépend largement des solutions apportées à la crise des dettes souveraines ", affirme Jacques Mistral, directeur des études économiques à l'Ifri (Institut Français des Relations Internationales). A ses côtés, Christian Deubner, consultant indépendant à Berlin et Jean Pisani-Ferry, directeur du Bruegel, défendent eux aussi le fédéralisme fiscal. Ce modèle repose sur un principe de base : la solidarité des Etats face à leurs dettes souveraines. "L'Union monétaire ne peut fonctionner sans un degré d'intégration financière plus poussée", indique Jacques Mistral. Même constat pour Jean Pisani-Ferry pour qui le problème européen est un "problème d'unité". Deux types de fédéralisme s'offrent à la zone euro : le modèle allemand d'un côté, l'américain de l'autre. Leur point commun, le faible contrôle exercé par l'Etat central sur la politique fiscale des sous-unités. "Pour l'avenir de l'Europe, il faut un système qui séloigne du modèle allemand et qui s'approche du modèle américain", estime Christian Deubner. Ce spécialiste de politique européenne, Christian Deubner défend l'idée d'un seuil limite pour le montant de la dette souveraine de chaque Etat. "La dette de chacun des Etats membres serait différenciée", ajoute-t-il.

Des dettes étatiques solidaires

Faire un pas vers le fédéralisme fiscal obligerait les Etats de la zone euro à donner de nouvelles garanties sur leurs dettes : "Les Etats deviendraient co-responsables de leurs dettes", explique Jean Pisani-Ferry. En clair, les Etats devraient donner leur accord avant qu'un emprunt national puisse être contracté. "La capacité de s'endetter est autonome mais avec un contrôle a priori. Ce contrôle peut être judiciaire ou parlementaire, ce qui implique alors un degré d'intégration politique plus poussé". En Allemagne, on réfléchit déjà à ce principe de dettes solidaires, reposant sur des contrôles a priori. En France, le débat reste encore très timide. "Concentrer une telle coordination sur le droit de s'endetter et rien d'autre est une illusion, et une illusion dangereuse. Ce n'est ni souhaitable, ni réaliste. Cela ne se fait ni en Allemagne, ni aux Etats-Unis", prévient Christian Deubner.

Un nouveau rôle pour la BCE

A l'heure où les économies grecques et italiennes sont surveillées de près, les trois intervenants de la table ronde appellent aussi à un renforcement du rôle de la Banque Centrale Européenne. "La question de l'intervention de la BCE comme prêteur en dernier ressort est pour le moment bloquée", souligne Jacques Mistral. Aujourd'hui, la BCE n'a pas la possibilité d'intervenir auprès d'un Etat devenu insolvable. " Pour autant, selon Jean Pisany-Ferry, elle a aussi une mission de stabilité et devrait donc pouvoir intervenir sur le marché de la dette publique", considère Jean Pisani-Ferry.

Et le directeur du Bruegel de conclure en s'inspirant d'une citation de Tolstoï: "Toutes les familles heureuses le sont de la même manière, les familles malheureuses chacune à leur façon : c'est la même chose pour l'Europe".

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