Martine Durand : "Réconcilier la micro-économie et la macro-économie"

Lors d'une table ronde consacrée à la mesure du bien-être, Martine Durand, directrice des statistiques de l'OCDE, a présenté "Comment va la vie ?", un indicateur du bonheur dévoilé en mai dernier.

A quoi sert une enquête sur le bien-être?

Nous avons développé des indicateurs pour permettre aux politiques de connaître les préoccupations réelles de leurs concitoyens. Ces données vont les aider à évaluer les arbitrages au moment où ils devront prendre des décisions. Imaginons par exemple que le gouvernement décide d'accorder des subventions à l'Alsace-Lorraine pour financer les hauts fourneaux devant fermer. En prenant cette mesure, ils contribuent à soutenir l'emploi. Or, s'ils s'interrogent sur les attentes des habitants de la région, ils constateront que les gens préféreront, éventuellement, qu'on ferme ces entreprises très polluantes. L’Etat pourrait donc investir, à la place, dans une entreprise écologique, créatrice d'emplois.


Pourquoi l'OCDE a-t-elle investi presque dix ans dans ce travail psycho-sociologique ?

Début 2000, nous avons décidé de lancer une enquête prospective sur la façon de mesurer le progrès dans la société. Notre objectif était de voir à quoi ressemblera la France dans dix ans. Nous avons rencontré de nombreux économistes et statisticiens qui nous ont poussés à nous détacher de l'économique pour nous intéresser aux indicateurs du bien-être. Une partie de l'OCDE était sceptique au début mais nous nous sommes finalement lancés dans ce projet. C'est notre travail de répondre aux attentes de chacun. Les opinions publiques ont un réel besoin de s'exprimer.

Pourquoi les études de mesure du bonheur se multiplient-elles ?

Les enquêtes sur le bien-être sont effectivement de plus en plus nombreuses. David Cameron a lancé l'an dernier une grande consultation nationale en Grande-Bretagne, présentée en juillet 2011. En Allemagne, une commission paritaire étudie actuellement ce sujet. Et en Italie, de nombreuses organisations non gouvernementales enrichissent les statistiques nationales. Il ne s'agit pas d'un phénomène de mode mais d'un intérêt plus ancien et plus profond : réconcilier la micro-économie et la macro-économie. Dans ce monde en crise, les populations veulent que les institutions s'intéressent aussi à eux en tant qu'individus.

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