« Le salaire minimum est un moyen de sortir les travailleurs de la pauvreté »

Lors d'un débat aux Jéco, Philippe Askenazy, directeur de recherche au CNRS et membre des Economistes atterrés (opposés au néo-libéralisme), a défendu une augmentation du salaire minimum. Une mesure paradoxalement souvent instaurée par des gouvernements conservateurs.

Pourquoi ce sont aujourd’hui des gouvernements conservateurs qui décident d’augmenter le salaire minimum ?

L’Allemagne et la Grande-Bretagne se sont aperçues qu’en laissant aller les salaires il y avait une très forte augmentation de la pauvreté laborieuse, c’est-à-dire des personnes travaillant mais pauvres. La France, elle, a été protégée de cela, notamment par le salaire minimum. En Grande Bretagne, une des réponses donnée par Tony Blair avait été de développer les prestations sociales notamment vis-à-vis des familles. Mais par la suite, compte-tenu des contraintes budgétaires, on s’est demandé s’il fallait revenir sur cette politique. En Allemagne, on se posait la question de la redistribution. Dans les deux cas, il y a eu la même réponse: mise en place d’un salaire minimum ou augmentation de celui existant. Il y a cette idée que le salaire minimum est un moyen de faire sortir une partie de la population laborieuse de la pauvreté, sans avoir recours à des transferts sociaux.

L’augmentation du salaire minimum peut-elle influer sur l’emploi ?

En France, la dernière fois qu’il y a eu une grande augmentation du salaire minimum, ça remonte à la fin des années 1990, début 2000. Entretemps, l’économie mondiale s’est profondément modifiée. On ne peut pas regarder dans le rétroviseur en se disant que ce qui avait été constaté à cette période, c’est-à-dire certainement un effet négatif, est toujours vrai aujourd’hui. Essayons d’observer l’expérience menée par nos voisins. Je considère qu’aujourd’hui on n'a pas le savoir scientifique qui nous permette de dire qu’augmenter le salaire minimum est néfaste pour l’emploi ou pas.

Le salaire minimum est-il un facteur d’égalisation entre hommes et femmes ?

Pour un emploi donné, une femme est payée 10% de moins qu’un homme. Si on supprime le salaire minimum les premières victimes sont les femmes. C’est un parachute pour les femmes pour éviter qu’elles ne se retrouvent totalement écrasées par un fonctionnement économique d’une société machiste.

Propos recueillis par Alban de Montigny

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