Une simple directive européenne sur le secret des affaires... Le sujet aurait pu passer inaperçu juste avant l'été : il a, au contraire, créé un véritable tollé dans la presse européenne.
Pour contrer ce projet de directive, une pétition, à l'époque, est lancée notamment par la journaliste Elise Lucet. Elle recueille alors plus de 310 000 signatures. Et si les journalistes sont inquiets, c’est parce qu’ils redoutent, comme l'Ajef (association des journalistes économiques et financiers) les conséquences d’un texte qui pourrait empêcher leur travail.
Swiss leaks, Luxleaks
Sur la scène de la salle Paul Garcin, Anne Michel, journaliste au Monde ne décolère pas contre ce projet et égrène les grosses affaires qu’elle a traitées, Luxleaks, Swiss Leaks… « Ces enquêtes n’auraient pas pu être conduites si le secret des affaires n’avait pas été levé par des lanceurs d’alertes », tient-elle à rappeler tout en précisant que, « les tentatives d’intimidation sont multiples ». Anne Michel dénonce un texte qui est volontairement flou. « Ce genre de texte, pas assez précis, laisse une forte marge d’interprétation au juge avec un risque important pour la liberté de la presse ».
« Si c’est trop précis ça enserre, si c’est plus large ça permet au juge d’interpréter et souvent il le fera en faveur des journalistes », lui répond Claude Revel, conseillère-maître en service extraordinaire à la Cour des comptes et ancienne déléguée interministérielle à l’intelligence économique. Elle rappelle également l'utilité, selon elle, d'un texte avant tout destiné à protéger les secrets industriels de nos entreprises, donc, au final, nos emplois.
Le secret des sources
Le numérique a en effet démultiplié les possibilités de mettre la main sur des secrets industriels. « C’est facile de trouver des portes d’entrée dans les systèmes informatiques de la plupart des entreprises », assure Jacques Cremer, chercheur à la Toulouse School of Economics.
A la fin d’un débat mouvementé, Anne Michel, lance une dernière fois, « l’accès à l'information, du point de vue des journalistes, est aussi important que la diffusion de l’information » et que le secret des sources.
Alban de Montigny