Par Gilbert Cette, Professeur à NEOMA Business School, interviendra sur les conférences des Jéco 2022 : Pourquoi les entreprises peinent à recruter ?, Le pouvoir d’achat menacé et Quel statut pour les travailleurs des plateformes ?

Le soutien direct au pouvoir d'achat ne pouvant être que partiel, mesuré et transitoire, compte tenu de notre dette, et faute de pouvoir augmenter la productivité, il ne nous reste qu'une piste : l'augmentation du taux d'emploi.

La hausse de l'inflation observée sur les derniers trimestres a comme principale origine, en France comme dans les autres pays européens, un renchérissement du prix des importations, en particulier des produits énergétiques. Ce renchérissement constitue un prélèvement sur les richesses produites qui affaiblit le pouvoir d'achat moyen. Trois voies seulement peuvent atténuer cet impact : la dette, la productivité ou la quantité de travail. La France a déployé divers dispositifs publics pour soutenir le pouvoir d'achat. Sans doute, à ce stade, plus massivement que les autres pays européens. Cela a pour conséquence d'augmenter la dette publique déjà considérablement alourdie par les autres dispositifs engagés pour faire face au choc du Covid, dans notre pays qui pâtissait avant la pandémie d'une situation de fort endettement public.

La charge de cette dette, par ailleurs renchérie par la hausse des taux d'intérêt, bride l'ambition des autres politiques publiques et constitue un bien triste cadeau fait aux prochaines générations. Ce soutien du pouvoir d'achat ne peut donc être que partiel, mesuré et transitoire.

Le numérique ne dope pas (encore) la productivité

Depuis le milieu de la première décennie des années 2000, les gains de productivité sont historiquement faibles en France comme dans les autres pays européens avancés, de l'ordre de 0,5 % par an. Ils sont même nuls sinon négatifs depuis le début de la crise Covid. Cela enrichit le contenu en emplois de la croissance mais aboutit à une faible contribution potentielle de la productivité aux gains de pouvoir d'achat.

La révolution numérique se traduira à terme par un rebond de la productivité, qui pourrait être dynamisée dans un avenir plus proche par d'autres changements, comme l'extension du télétravail et la montée des taux d'intérêt qui se traduira par un effet de sélection des entreprises en faveur des plus performantes. Mais l'ampleur et l'horizon de ces mécanismes sont incertains, ce qui doit amener à privilégier à court et moyen terme la troisième des voies évoquées plus haut.

Le taux d'emploi français est plus faible qu'ailleurs

La France se caractérise par un taux d'emploi nettement plus bas que celui des pays du nord de l'Europe, essentiellement pour les jeunes et les seniors. L'augmentation du taux d'emploi observée sur les dernières années doit être poursuivie, ce qui contribuera à soutenir le pouvoir d'achat moyen. Pour les jeunes, la réforme de l'apprentissage et les récentes politiques d'insertion ont des effets favorables et doivent maintenant être prolongées. Pour les seniors, une réforme des retraites est indispensable.